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8 décembre 2011 : Rencontres Sorosoro à la Maison des Cultures du Monde, Paris, France
Sorosoro a donc fêté ses trois ans le jeudi 8 décembre, au cours d’une manifestation qui réunissait des intervenants de grande qualité.
Tout d’abord, la romancière Irène Frain a introduit la soirée avec brio en racontant l’histoire de la communauté des Bishnoïs en Inde. Conduite par Djambo, cette communauté est née à la fin du 15ème siècle au Rajasthan et s’est développée selon 29 principes de vie en harmonie avec la nature. Bien avant que les questions environnementales ne deviennent à la mode, ils avaient compris qu’il était capital de planter et protéger les arbres pour que l’homme ait une chance de survivre dans ces contrées désertiques. Et plusieurs centaines d’entre eux n’hésitèrent pas à se faire tuer en protégeant de leur bras les arbres que les Rajahs convoitaient pour leurs palais…
Puis, toujours sur le thème de l’Inde, ce fut au tour de la grande linguiste Anvita Abbi de donner au public un aperçu de ce qu’est la diversité linguistique dans son pays : 22 langues officielles mais aussi plusieurs centaines de langues maternelles, pas encore toutes répertoriées. Anvita a parlé tout particulièrement des langues des îles Andaman, au large de l’Inde, des langues très particulières venues d’Afrique il y a des milliers d’années. Ils ne sont plus aujourd’hui que quelques centaines à les parler, et s’ils venaient à disparaître ce serait une grande perte pour l’humanité toute entière.
Vint ensuite Colette Grinevald, membre du Conseil Scientifique de Sorosoro, et l’une des pionnières de la discipline de la documentation des langues en danger. Colette a pu retracer ses 40 ans de travail de terrain en Amérique Latine, et c’est avec beaucoup d’émotion qu’elle est revenue sur ses années passées au Nicaragua, au Guatemala et en Bolivie. Les peuples autochtones commençaient alors à faire valoir leurs droits et demandaient aux linguistes de venir les aider à codifier et écrire leurs langues…
La deuxième partie de la soirée était consacrée aux réalisations de Sorosoro de ces deux dernières années. Ce fut donc l’occasion de montrer quelques films, et en particulier un reportage sur les Bb-lecture de Marie-Adèle Jorédié en Nouvelle-Calédonie. Cette expérience où l’on voit Marie-Adèle initier les enfants kanak de langue xârâcùù au livre et à la lecture a également beaucoup intéressé et séduit le public, tant elle montre qu’il existe des façons concrètes et non agressives de scolariser et d’intégrer des enfants qui ne sont pas de langue maternelle française.
L’Afrique, enfin, n’était pas en reste puisqu’un conte du formidable Issouf Coly, de la communauté baynunk en Casamance au Sénégal a tenu le public en haleine: « Comment le lièvre échappa à la hyène ». Un conte animalier qui n’est pas sans rappeler un certain Jean de la Fontaine…
Au programme aussi, Marcel Camara, membre de la communauté Bedik à l’est du Sénégal, qui a été chargé de traduire en français tout ce que Sorosoro a filmé dans son village en langue menik. Marcel est aujourd’hui installé en France, où il travaille comme éducateur, et il est venu témoigner de ce que cela représente pour lui, de voir ainsi les traditions et la langue de son peuple filmés et préservés pour la postérité. Dans un grand moment d’émotion, le public a donc pu découvrir tout à la fois ce témoignage extrêmement touchant et les magnifiques images filmées par Muriel Lutz lors d’une fête bedik qui ne manquait pas de couleurs… A découvrir peut-être bientôt sur www.sorosoro.org…
Et la soirée s’est terminée par le film indien Yarwng, tourné dans une langue tribale, le kokborok. Un film qui raconte une histoire d’amour contrariée par la construction d’un barrage causant l’engloutissement de villages entiers à l’est de l’Inde…
Merci à toute l’équipe de Sorosoro pour son efficacité, et aux intervenants pour leurs passionnantes conférences ! Il reste à présent à espérer que Sorosoro connaisse un 4ème anniversaire…..