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Le tamazight
Page réalisée par Salem Mezhoud, Chercheur-Consultant, Université de Londres, UNESCO.
Données sur la langue tamazight
Nom de la langue :
Tamazight : nom par lequel les populations elles-mêmes qualifient leur langue (endonyme).
Berbère : nom donné par les personnes extérieures (exonyme).
(Note : « gh » est prononcé comme le r parisien. Dans la transcription actuelle en caractères latins, il est souvent rendu par la lettre γ).
Le mot berbère descendrait de l’appellation « barbare » dont les Romains désignaient les peuples qui ne s’intégraient pas à leur empire (et que les Grecs utilisaient avant eux). Il a été, par la suite, repris par les Arabes bien que les écrits du Moyen Age en langue arabe utilisaient le plus souvent le terme « mazigh ».
Amazigh est le nom que les Berbères se donnaient et recommencent à se donner eux-mêmes. Le terme avait presque disparu de l’usage courant et n’était plus utilisé que dans certaines régions (Moyen Atlas marocain et Touaregs) jusqu’aux années 1930-1940, époque à laquelle Il fait un retour dans les milieux nationalistes, en particulier en Algérie.
Après l’indépendance de l’Algérie le Mouvement Culturel Berbère, rejetant la terminologie officielle arabo-islamique, a généralisé les termes « Amazigh » pour désigner le peuple et celui de « tamazight » pour la langue berbère. Ce terme est maintenant devenu le symbole de la revendication culturelle, politique et linguistique de toutes les communautés berbères d’Afrique du Nord.
NB : Amazigh est un nom masculin, dont le pluriel est Imazighen. Le mot amazigh est également souvent utilisé en français comme adjectif qui s’accorde pour donner « amazighe » au féminin et « amazighs », « amazighes » au pluriel (masculin ou féminin).
Tamazight, la langue, est du genre féminin.
Noms alternatifs :
Divers noms régionaux ou dialectaux :
Noms exonymes : Kabyle, Chaoui, Chleuh, Touareg, Mozabite, Rifain etc.
Noms endonymes : Taqbaylit, Tashawit, Tumzabt (Tamzabit) Tashelhiyt, Tamasheq, Tarifit etc. Ces termes, souvent d’origine arabe et à connotation péjorative, désignent les dialectes régionaux et, pour des raisons historiques, ont remplacé le mot générique Amazigh.
Classification :
La langue berbère appartient à la grande famille Afro-Asiatique, une famille dont l’existence est loin d’être établie de façon satisfaisante : la parenté entre les langues de ce groupe n’est en effet pas certaine et les recherches comparatives demeurent incomplètes et diverses. Et si l’hypothèse de l’existence de cette famille commune fait aujourd’hui consensus, son nom est loin de faire l’unanimité. En effet, la famille afro-asiatique a également été appelée, par exemple, sémito-chamitique, chamito-sémitique, ou encore, en anglais, Lisramic.
Il est à noter que la dénomination « chamito-sémitique » a été abandonnée dans les pays anglo-saxons où s’effectue le gros de la recherche, mais qu’elle persiste en France et dans certains pays européens. Signalons que si la famille linguistique sémitique est parfaitement établie, il n’existe, par contre, pas de famille « chamitique ». Les langues non sémitiques (tel le berbère) appartiennent à ce qu’il est coutume d’appeler la branche africaine de la famille Afro-Asiatique.
La référence biblique (Cham, son frère Sem et son fils Couch, notamment), attestée dès le 18e siècle, témoigne également du caractère non scientifique de la dénomination « chamito-sémitique » et du danger de son utilisation qui permet des conclusions faciles. Elle a, de fait, donné lieu à des appellations erronées, et parfois racistes, qui sont maintenant discréditées : par exemple, Hamite, calqué sur Sémite, dénoterait l’existence d’une appartenance ethnique commune.
En réalité, tamazight a emprunté massivement au fonds lexical et à la phonologie de deux langues sémitiques présentes sur son territoire depuis plusieurs siècles, au rôle politique et culturel important : le punique et l’arabe. On devrait donc s’abstenir de toutes conclusions hâtives sur la base de ces données.
Aire géographique :
Tamazight est parlé dans toute l’Afrique du Nord et la zone saharo-sahélienne.
Alors qu’il aurait formé, dans l’Antiquité, un ensemble homogène allant de l’Egypte aux Iles Canaries, son aire linguistique est, de nos jours, interrompue par de larges poches arabophones ou bilingues arabe-berbère : désormais, les communautés tamazightophones (ou amazighophones) sont présentes en Egypte, en Libye, en Tunisie, en Algérie, au Maroc, en Mauritanie, au Mali, au Niger, au Burkina Faso et, de façon limitée, dans le nord du Nigeria et du Cameroun.
Principaux dialectes :
Pour des raisons historiques et géographiques, Tamazight est fortement dialectalisée. Le développement séparé des dialectes a été favorisé par deux facteurs principaux : l’isolement géographique des différentes communautés linguistiques et l’utilisation de l’arabe « dialectal » comme lingua franca dans les zones de contact, généralement urbaines.
Les principaux dialectes sont : Taqbaylit (Kabylie, Algérie), Tashawit (Aurès, Algérie), Tamzabit ou Tumzabt (M’zab, Sahara algérien), Tarifit (Rif marocain), Tamazight, Tashelhit (Moyen et Haut Atlas marocains), Tamaheqt, Tamasheq, Tamajeq (Touaregs respectivement d’Algérie, du Mali et du Niger).
Un certain nombre d’autres dialectes d’importance variable, sont éparpillés sur tout le territoire nord-africain de l’Egypte (Oasis de Siwa), en Libye (Mont Nefusa, Ghadames), en Tunisie (Djerba), ainsi qu’en Algérie (Tashenwit, Tagargrent) et en Mauritanie (voir ci-dessous).
Du fait de l’isolement des dialectes dans leurs aires géographiques respectives, ils ont subi des développements parallèles mais séparés sur les plans syntaxique, phonologique et lexical. La plupart des dialectes ont emprunté de façon massive au vocabulaire arabe (ou sémitique, si l’on tient compte du punique), au latin, au français, et dans une moindre mesure, aux autres langues méditerranéennes (espagnol, italien, turc). Tamasheq a également emprunté au hausa et au peul.
Ce développement séparé a parfois créé des barrières à la compréhension mutuelle, due, en grande partie, à l’absence de communication et donc de familiarité entre les dialectes. De là vient l’idée reçue de « parlers » berbères inintelligibles entre eux (s’ajoutant à la connotation péjorative du mot dialecte). Les linguistes reconnaissent, cependant, l’unité de tous ces dialectes et leur appartenance à une langue tamazight unique.
Nombre de locuteurs :
Les milieux officiels de tous les pays de la région sous-estiment généralement l’importance des populations berbérophones. Au lendemain des indépendances, il n’était pas rare pour les gouvernements, imprégnés d’idéologie arabo-islamique, d’aller jusqu’à nier l’existence même des Berbères, ou de les reléguer au rang d’objets de folklore touristique voués à disparaître une fois (r)établie l’ « arabité » dans toute la région.
Il est ainsi coutume de situer les berbérophones à :
– 25 à 30% de la population totale du Maroc (environ 32 millions en 2011) ;
– 17 à 20% du total de la population algérienne (entre 35 et 37 millions en 2011) ;
– 1% de la population tunisienne.
Ces chiffres ne sont basés sur aucune donnée réelle, aucun recensement linguistique n’ayant jamais eu lieu où que ce soit dans la région. Ils sont toutefois repris et répandus constamment, y compris par les spécialistes berbères eux-mêmes dans un souci de projeter une image « objective ».
Ces données officielles sont en fait loin de la réalité, pour plusieurs raisons :
– ces chiffres ne prennent habituellement en compte que les populations des zones entièrement amazighophones et n’incluent pas les locuteurs des zones bilingues ;
– des zones entières (Chenoua, Beni Snous et certaines régions de l’Ouarsenis, le Gourara) ne figurent que rarement dans les statistiques ;
– les amazighophones de la diaspora ne sont pas comptabilisés.
En prenant ces données en compte, le nombre de berbérophones atteindrait 70% au Maroc, et 50% en Algérie. Le nombre de locuteurs de tamazight dans une douzaine de pays pourrait donc se situer entre 45 et 50 millions.
Statut de la langue :
Au Mali et au Niger, dès l’indépendance, plusieurs langues locales ont été reconnues comme langues nationales, dont le berbère (dans sa variante tamasheq, ou tamajeq), le français demeurant langue officielle.
Les autres pays de la région, au nord et en Mauritanie, ont quant à eux tous adopté l’idéologie arabo-islamique ainsi qu’une politique d’arabisation qui, dans la plupart des cas, se doublait d’une offensive virulente anti-berbère. Celle-ci visait clairement l’éradication de tamazight, et l’introduction et la généralisation de l’arabe classique (standard) en tant que langue maternelle et langue de communication et d’éducation à tous les niveaux.
Une résistance populaire farouche s’est alors cristallisée, en Algérie en particulier, autour de mouvements sociaux d’importance croissante, tels le Printemps berbère (tafsut imazighen) parti de Kabylie en avril 1980, la formation de la Ligue Algérienne des Droits de l’Homme (1985), la grève des cartables (dans les années 1990), la création des « arouches » (comités régionaux démocratiques et indépendants des structures étatiques), et enfin le « Printemps noir » de 2001. Cette mobilisation permanente de la population a amené le gouvernement algérien à assouplir sa position et à effectuer des révisions de sa politique. Depuis 2002, tamazight est reconnu par la Constitution algérienne (par amendement à l’article 3) en tant que langue nationale (l’arabe seul étant langue officielle).
Au Maroc également, la mobilisation populaire s’est développée de manière significative et a culminé par la reconnaissance de tamazight comme langue nationale et officielle lors du référendum constitutionnel de juillet 2011. Aucun autre pays d’Afrique du nord n’accorde à ce jour de statut officiel à tamazight.
En Libye, les populations berbères du Nefousa ont joué un rôle de premier plan dans la révolution de 2011 et devraient donc exiger une certaine reconnaissance de leur culture et de leur langue.
Vitalité et Transmission :
L’abandon de tamazight comme langue maternelle (au profit de l’arabe dialectal) a démarré au début de l’époque coloniale. Ce basculement linguistique s’est accéléré durant les premières années de l’indépendance (1956 pour le Maroc et la Tunisie, 1962 pour l’Algérie), notamment avec l’exode rural et l’usage de l’arabe nord africain comme lingua franca dans les zones urbaines. Il a ensuite ralenti dans les années 1970, notamment en Kabylie, grâce à la mobilisation du Mouvement Culturel Berbère avec la prise de conscience et la résistance qui en ont découlé.
Tamazight jouit aujourd’hui d’une importante revitalisation en Kabylie, dans le Rif, le Haut et le Moyen Atlas marocains (Tashelhit, Tamazight), dans le Sahel (Tamasheq) et, de plus en plus, en Libye. Ce mouvement touche en priorité les lycéens et les écoliers et il semble que la transmission de la langue aux jeunes générations soit assurée.
En revanche, dans plusieurs régions d’Algérie, les dialectes tamazight (Tashenwit, Tasnusit, Tagragrent) continuent de subir les attaques des médias officiels et de la bureaucratie d’Etat et risquent l’extinction. Ceci est également le cas en Mauritanie et, jusqu’à récemment, en Tunisie et en Libye. Les sursauts démocratiques dans ces pays ouvrent la voie à d’énormes possibilités pour la renaissance de la culture et de la langue amazighes.
Médias :
Dans la quasi-totalité du territoire nord-africain, à l’exception du Mali et du Niger, l’absence de statut juridique a partout entraîné une absence de tamazight dans les médias officiels, hormis quelques émissions à la radio algérienne. Les amazighophones ont ainsi été amenés à s’exprimer par le biais de publications clandestines durant les deux premières décennies qui ont suivi la décolonisation.
A partir du Printemps Amazigh en 1980, les gouvernements, sous pression, ont commencé à faire des concessions, en particulier en Algérie et au Maroc.
Dans le sillage des émeutes d’octobre 1988, le multi-partisme et la liberté d’expression ont fait leur entrée dans le champ public en Algérie. Des journaux en langue tamazight ont été créés, des publications diverses on vu le jour et les chaînes de télévision ont commencé à émettre en tamazight. Après 1988, des émissions en tamazight ont investi la télévision d’Etat.
Le Maroc, quant à lui, a aussi fini par faire entrer la langue tamazight dans ses médias et ses établissements d’enseignement : la huitième chaîne de télévision marocaine, dénommée Tamazight, a démarré en janvier 2010 et émet entièrement dans cette langue.
A Paris une chaîne privée, Berbère TV, émet en tamazight depuis 2000.
En Lybie, enfin, des programmes en tamazight sont diffusés sur la chaîne de télévision Libya TV depuis l’été 2011.
Enseignement :
L’enseignement de tamazight dans les écoles primaires de Kabylie a été arraché aux autorités algériennes par la population à la suite de la longue succession de conflits et confrontations dirigés par le Mouvement Culturel Berbère (MCB) et les partis politiques implantés dans la région. Cet enseignement demeure insuffisant et les amazighophones des autres régions n’y ont pas accès.
Au Maroc l’enseignement primaire de tamazight a été introduit dans tout le pays en 2002.
Toujours au Maroc, l’Institut Royal de la Culture Amazighe (IRCAM) a vu le jour en octobre 2001. Cet établissement de recherche est le fruit de la réalisation par le roi Mohammed VI d’une promesse faite par son père, Hassan II, dans la foulée du Printemps Berbère d’avril 1980 en Algérie.
Le gouvernement algérien, quant lui, a créé en 1994 un Haut Commissariat à l’Amazighité, rattaché à la Présidence et dont le but officiel est de promouvoir la langue et la culture amazigh. Les universités de Bgayet (ex-Bougie et officiellement Bejaia) en Kabylie possèdent des départements de langue et culture tamazight. L’université de Batna dans les Aurès, dispense quant à elle un enseignement limité de langue.
Ecriture et littérature :
L’écriture et la littérature amazighes ont, en quelque sorte, existé avant l’enseignement de la langue.
Tout d’abord, l’écriture propre à tamazight se nomme tifinagh et descend de l’écriture libyco-berbère de l’Antiquité. Elle n’était jusqu’à une période récente préservée que chez les Touareg qui en faisaient un usage quotidien. Le renouveau amazigh dans le nord (Kabylie, Maroc) s’est très vite intéressé à ce patrimoine qui, sous des formes modifiées (le néo-tifinagh), a servi de base à toute la revendication amazigh.
L’Ecriture tifinagh est maintenant utilisée dans l’enseignement en Algérie en parallèle avec l’alphabet latin. Au Maroc, c’est l’écriture adoptée officiellement par l’IRCAM pour la transcription de tamazight.
L’alphabet latin continue cependant d’être l’outil préféré de nombreux écrivains et universitaires, surtout en raison de son universalité et de l’existence d’équipement informatique et d’imprimerie accessible.
En ce qui concerne la littérature, elle existe depuis le 19e siècle, parfois adaptée de la tradition orale très riche, et transcrite en caractères latins.
Une nouvelle littérature écrite est apparue à partir des années 1960. Œuvres originales telles que romans ou nouvelles (notamment en Kabylie), traductions de grands textes européens et adaptations d’œuvres classiques continuent de voir le jour en dépit du manque d’encouragement, voire des obstacles délibérément semés par les milieux officiels afin d’empêcher la réussite de la renaissance amazigh.
Précisions historiques
La langue tamazight occupait, historiquement, tout le nord de l’Afrique à l’exception de l’Egypte, et une partie du Sahara.
Au cours de l’histoire, elle a souvent partagé ce territoire avec d’autres langues, notamment, dans l’Antiquité, l’égyptien voisin, le grec, le phénicien (punique) et le latin. Plus tard ce furent avec l’arabe et le français.
Dans tous les cas, les Berbères ont adopté la langue étrangère comme moyen d’expression écrite : Septime Sévère, Caracalla, Tertullien, St Cyprien, St Augustin s’exprimèrent en latin ; Ibn Tumert, Ibn Firnas (Armen Firman), al Jazuli, Ibn Batuta en arabe.
Depuis 1830, le français est devenu la langue de communication de toute l’Afrique du Nord à l’exception de la Libye.
Précisions ethnographiques
L’arabisation de l’Afrique du Nord à partir du Moyen Age n’est pas due à la présence d’une communauté arabe, somme toute insignifiante. Elle est plutôt due au prestige de la langue arabe en tant que langue liturgique devenue plus tard langue culturelle et scientifique, comme le latin l’était au même moment en Europe. De fait, le substrat arabe de la population nord africaine est infime, l’ « arabité » n’étant qu’un phénomène linguistique.
Paradoxalement, la conquête française a favorisé également l’arabisation, pour un ensemble de raisons : l’ignorance des conquérants des réalités sociologiques nord africaines, les préjugés orientalistes tels que ceux hérités de la conquête de l’Egypte, les aspirations de Napoléon III à égaler son illustre oncle notamment en se proclamant « roi des Arabes », l’utilisation d’interprètes, de guides puis d’administrateurs arabophones en milieu berbère ont largement participé à l’arabisation linguistique du pays et contribué à ancrer le mythe de l’Afrique du Nord arabe dans l’imaginaire français puis européen.
Précisions sociolinguistiques
La présence de langues étrangères en Afrique du Nord a favorisé le développement du multilinguisme et a incité tamazight à emprunter aux langues voisines, tout particulièrement l’arabe et le français, provoquant un certain appauvrissement de leur propre langue.
Cet appauvrissement a été, dans une certaine mesure, contré par la forte dialectalisation de tamazight : certaines communautés ont conservé un lexique propre abandonné par d’autres au profit des emprunts et assuré la sauvegarde d’un riche vocabulaire qui aurait pu disparaître.
Au final, si certains dialectes particuliers ont subi une érosion lexicale, l’ensemble de la langue amazighe possède, cumulativement, un vocabulaire très riche en grande partie déjà recensé dans un nombre important de dictionnaires, de manuels et de grammaires.
Par ailleurs, l’étendue et la diversité du territoire et des cultures ont rendu possible la création de lexiques spécialisés, propres à chaque communauté (montagne, oasis, plaines, côtes) et groupe socio-économique (arboriculture, élevage, pêche, nomadisme). Cette richesse lexicale commune ajoutée à une littérature orale ancienne et sophistiquée représente un potentiel considérable pour toute entreprise de standardisation de Tamazight.
Précisions linguistiques
Le degré d’intelligibilité mutuelle varie selon les dialectes, mais on distingue grosso modo deux groupes principaux :
l’un au nord allant du Rif marocain aux confins égypto-libyens ;
l’autre au sud allant d’Agadir et du Haut Atlas marocain jusqu’au désert malien et nigérien, se rapprochant du Tchad et du Cameroun.
La principale distinction entre ces deux groupes est la spirantisation des voyelles dans les dialectes du nord, c’est-à-dire, pour simplifier, un phénomène phonologique qui consiste à transformer les consonnes plosives en fricatives au même point d’articulation, alors que les consonnes des dialectes méridionaux restent occlusives :
Groupe sud (tashelhit, tamasheq etc.) : | b, k, d, g, t | API : [b], [k], [d], [g], [t] |
Groupe nord (aqbaylit, tarifit etc.) : | b, k, d, g, t | API : [v], [x], [ð], [ɣ], [θ] |
Exemples :
Tashelhit | Taqbaylit (prononciation) | Français |
Tamart | θamarθ | menton, barbe |
taghma | θaghma | cuisse |
idmaren | iðmaren | poitrine |
tigzz’elt | θigz’elt | rein |
akal | axal | terre, pays |
babatsent | vavaθsent | leur père |
gma | ɣma | mon frère |
Les divergences syntaxiques et morpho-syntaxiques, bien que plus prononcées entre les dialectes touaregs (Tamajeq, Tamaceq) et ceux du nord, se retrouvent de manière variable entre les autres dialectes :
Tashelhit | Taqbaylit | Français |
man aghrum a rad tawit ? | anwa aghrum ar a(d) tawid’ ? | quel pain emporteras-tu ? |
man tigemmi a tesghit ? | anwa axxam i tughed’ ?
(anta tazeqqa) i tughed’ ? |
quelle maison as-tu achetée ? |
manta irzem taghult ? | anta i illin tawwurt ? | qui (féminin) a ouvert la porte ? |
mami tfkit tabrat ? | i wumi tefkid’ tabratt ? | à qui as-tu donné la lettre ? |
Sources, liens, et bibliographie
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Galand, Lionel. 1979. Langues et littérature berbères. Vingt-cinq ans d’études berbères. Paris, CNRS.
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Mammeri, Mouloud. 1980. Poèmes kabyles anciens. Paris, La Découverte.
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Sites web :
Centre de Recherches Berbères. INALCO.
IRCAM. Le site officiel de l’Institut Royal de la Culture Amazigh. Maroc
Université Laval, Québec, Canada. Aménagement linguistique dans le monde. Afrique
La depeche de Kabylie : Le journal des hommes libres.
Le Rif on line, le site de l’activité amazigh et de rif en temps réel.
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