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Le māori
Relecture et complément d’information par Elizabeth Pearce, School of Linguistics and Applied Language Studies, Victoria University of Wellington.
Données sur la langue māori
Noms alternatifs : Te Reo Māori (« la langue māori »), maori.
Il existe également une langue dénommée « maori », parlée aux îles Cook, généralement désignée sous l’appellation « maori des îles Cook » ou encore « rarotongien », qui y a le statut de langue officielle et est utilisé assez largement comme langue véhiculaire dans le pays. Elle est assez proche du māori de Nouvelle-Zélande, mais nous distinguerons ces deux langues ici.
Aire géographique : Nouvelle-Zélande. Le māori est principalement parlé dans la partie nord, dans le centre et l’est de l’île du Nord. On trouve également des locuteurs dans tous les centres urbains de Nouvelle-Zélande. Avant la colonisation au 18ème siècle, le māori était parlé sur l’ensemble des îles Nord et Sud.
Dialectes et variantes : Traditionnellement on distingue trois dialectes principaux du māori : Dialecte oriental de l’île du Nord, dialecte occidental de l’île du Nord et le dialecte de l’île du Sud (ce dernier étant désormais éteint). Il semble qu’il n’y ait aucun problème d’intercompréhension entre locuteurs des différents dialectes. Cette distinction est surtout opératoire pour les locuteurs les plus âgés, chez les locuteurs plus jeunes les variantes sont très mélangées, particulièrement dans les zones urbaines.
Classification : Le māori fait partie de la très large Macro-famille des langues austronésiennes (qui comprend environ 1200 langues parlées dans le sud-est asiatique, à travers tout le Pacifique et jusqu’à Madagascar). Au sein de cette famille, il appartient à la branche est des langues polynésiennes, et plus précisément au sous-groupe « tahitique » des langues polynésiennes orientales.
Le māori de Nouvelle-Zélande est donc proche du maori des îles Cook (appelé également rarotongien ou rarotonga, d’après le dialecte principal de la langue), ainsi que du tahitien et des autres langues de la branche est des langues polynésiennes.
Dans les îles Chatham, à 650 km à l’est des deux îles principales de la Nouvelle-Zélande, était parlé le moriori, langue très proche du māori. Le moriori est éteint aujourd’hui, et nous en avons connaissance seulement par quelques textes.
Nombre de locuteurs : Il est difficile de trouver une estimation stable du nombre de locuteurs de māori. Selon un recensement national de 2006 il y aurait 157 000 locuteurs de māori, avec divers niveaux de compétences. Une autre enquête, Survey on the Health of the Māori Language 2001, suggère qu’environ 29 000 adultes seulement sont capables de parler « couramment » la langue ; la plupart âgés de plus de 50 ans. Tous les locuteurs adultes sont bilingues māori/anglais.
Statut : Le māori est une des deux langues officielles de Nouvelle-Zélande avec la langue des signes néo-zélandaises – l’anglais, bien qu’étant la langue dominante et celle de la plupart des institutions, n’a pas en réalité de statut officiel. En théorie, un citoyen néo-zélandais doit pouvoir avoir accès aux documents officiels, aux services publics et au système judiciaire en māori, mais en pratique, l’usage du māori dans les documents officiels et le bilinguisme des institutions gouvernementales sont extrêmement limités.
Enseignement : Le māori est langue d’enseignement au niveau maternelle dans les Kohanga Reo (« nid de langue », écoles pré-primaires spécialisées) ce qui représentait environ 9 000 enfants en 2006.
Il est enseigné comme langue seconde pour les enfants âgés de 5 à 16 ans. Il existe aussi plusieurs écoles proposant un programme bilingue anglais/māori, dont le but est de former des bilingues équilibrés. En 2007, environ 24 000 enfants et adolescents suivaient un des différents programmes d’enseignement en māori ou bilingue māori/anglais.
Cependant si ces programmes parviennent à former des jeunes générations locutrices de māori, ils ne réussissent pas complètement à former des bilingues équilibrés. Pour en savoir plus sur ce sujet, voir l’article de Richard Hill sur le blog de Sorosoro.
Le māori est enseigné à l’université, mais il n’y est pas utilisé comme langue d’enseignement.
Littérature : il existe une écriture māori basée sur l’alphabet romain et une tradition littéraire remontant au début du 19ème siècle. La production littéraire est en progression constante depuis les années 1990. Il existe cependant des grands manques dans la traduction littéraire vers le māori.
On peut trouver un grand nombre de dictionnaires, grammaires et manuels pédagogiques māori.
Médias : Deux chaînes nationales émettent des émissions en māori, dont l’une (Te Reo) diffuse exclusivement des émissions en māori, ou sous-titrées en māori. Il y a 21 stations de radio māori.
Vitalité et transmission : Malgré son statut de langue officielle, malgré sa présence dans les médias et dans l’enseignement, le māori est toujours une langue menacée. L’UNESCO le considère comme une langue « vulnérable ».
Précisions historiques et sociolinguistiques
La population Māori était estimée à 100 000 personnes juste avant la colonisation. La colonisation (relativement tardive, à partir du 19ème siècle) a entrainé un déclin rapide de la langue et de la culture māori. La population Māori était tombée à 48000 personnes à la fin du 19ème siècle. L’usage de la langue, stigmatisée, a décliné jusque dans les années 1970-80 au sein même de la population māori au bénéfice de l’anglais, langue de prestige et des institutions. Vers 1980, le māori n’était plus la première langue que de 20 % des membres de l’ethnie māori.
Depuis les années 60, les revendications des défenseurs de la langue et la culture māori ont progressivement touché un public de plus en plus large. Dans les années 1970 le lancement des écoles māori et du mouvement Kura Kaupapa Māori marque le début du processus de revitalisation de la langue. Peu à peu l’enseignement du māori en tant que langue seconde s’est développé. Les gestes symboliques, les moyens de diffusions et les manifestations officielles visant à promouvoir la langue se sont développés. Ainsi 1975 marque le lancement du Māori language week (semaine de la langue māori), destinée à promouvoir le māori. Elle a lieu tous les ans, la dernière semaine de juillet. En 1987, avec le Māori language act, le māori devient langue officielle. A cette même époque est fondée la Māori Language Commission, organisme officiel de promotion et de régulation de la langue māori.
De nos jours 560 000 personnes se déclarent Māori. Mais moins d’un quart de cette population aurait une connaissance de la langue. Si le nombre de locuteurs a progressé, la population Māori, au taux de fécondité plus élevé que la population d’origine « européenne » en Nouvelle-Zélande, a augmenté en proportion. Le pourcentage de Māori locuteurs de la langue n’a pas progressé de manière spectaculaire depuis le début du processus de revitalisation.
Le manque d’enquête approfondie sur l’usage de la langue et les niveaux de compétences des locuteurs rend difficile les évaluations précises de la vitalité de la langue et surtout de sa transmission. Le champ d’utilisation du māori dans le domaine public demeure très limité, ce qui confère peut-être à certains locuteurs une perception négative de son utilité et les pousse à favoriser l’usage de l’anglais, y compris dans le domaine privé. Il semble que, pour le moment, le māori reste en situation de diglossie vis-à-vis de l’anglais.
Même si le développement de l’enseignement, la progression de la langue dans les médias et les efforts faits pour promouvoir la langue, sont parvenus à ralentir l’érosion de la langue, il reste beaucoup à faire pour que la langue retrouve une place importante au sein de la communauté Māori et en Nouvelle-Zélande en général.
Quelques liens pour en savoir plus
Site réalisé par Peter Keegan sur le māori (en anglais)
Page du site de Linguamón consacré au māori de Nouvelle-Zélande et au māori des îles Cook
Māori language commission (māori/anglais)
Te Puni Kōkiri (Ministère du développement māori) (māori/anglais)
Dictionnaire anglais/māori en ligne
Liste des radios māori (écoutables en ligne)
Le site maorilanguage qui propose un grand nombre de ressources, de cours en ligne, et de liens concernant le māori (māori/anglais)
Bibliographie:
Bauer, Winifred 1993. Maori. With William Parker and Te Kareongawai Evans. London: Routledge.
Bauer, Winifred 1997. The Reed Reference Grammar of Maori. Auckland: Reed Books.
Harlow, Ray. 2001. A Maori Reference Grammar. Auckland: Pearson Education.
Si vous avez des informations complémentaires sur cette langue n'hésitez pas à nous contacter : contact@sorosoro.org