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L’arapaho
Page réalisée par Simon Couturier à partir de données fournies par François-Régis Rolland, 2018
Données sur la langue arapho
Noms alternatifs : Hinónoeitiit (autodénomination)
Classification : L’arapho est une langue amérindienne de la famille des langues algiques, et de la sous-famille des langue algonquines dites « des grandes plaines ».
Aire géographique : Aujourd’hui, elle est parlée dans la réserve indienne de Wind River, dans l’état du Wyoming. Elle était aussi historiquement parlée en Oklahoma, au sein de la nation Cheyenne-Arapaho, vivant à 20 minutes à l’ouest de la ville d’Oklahoma City, mais n’y serait actuellement plus pratiquée.
Nombre de locuteurs : L’arapho compterait désormais entre 100 et 200 locuteurs natifs, et de nombreux Arapahos la parlent également comme seconde langue plus ou moins maîtrisée.
Statut de la langue : L’arapaho n’a pas de statut officiel.
Médias/Littérature/Enseignement : Contrairement à des langues pourtant plus célèbres dans la région comme le cheyenne, l’arapaho a bénéficié de nombreuses recherches et publications. Les linguistes Kroeber, Michelson, et surtout Zdenek Salzmann, Andrew Cowell et Lisa Conathan ont élaboré des grammaires et dictionnaires. « The Arapaho Language » de Cowell en est par exemple une excellente description.
En ce qui concerne l’enseignement, une école a été créée en 2008 dans la réserve de Wind River pour enseigner la langue aux enfants, et elle comptait lors de son ouverture 22 élèves. Il existe également un très riche dictionnaire en ligne. Enfin, le site très complet de l’Arapaho Language Project, un projet de l’Université du Colorado pour promouvoir la langue et sa culture, comprend lui aussi un cours de langue.
Un stage linguistique d’été a également été organisé en 2015 au collège tribal de Wind River et à St. Stephens, dans le Wyoming.
Vitalité et transmission : La langue serait en situation critique, condamnée à moyen terme. Selon Cowelle et Moss (2008), seulement 300 personnes de moins de 50 ans parlaient l’arapaho dans le Wyoming en 2008. Aujourd’hui, tous les locuteurs natifs auraient donc autour de 60 ans et les enfants ne l’apprennent plus dans leurs familles. Ils en reçoivent cependant quelques notions à l’école. La langue est considéré e comme sévèrement en danger par l’UNESCO, et aurait même déjà disparue dans l’état de l’Oklahoma. Le nombre de locuteurs aurait chuté d’environ 1000 à seulement 250 en une vingtaine d’année, selon Greymorning (2011).
Précisions historiques, ethnographiques et sociolinguistiques
L’arapaho fait partie de la très grande famille algonquienne, qui s’étend des rives de l’Atlantique aux Montagnes Rocheuses, et du grand nord canadien au nord du Mexique. Cette famille comprend également des langues comme le micmac, le passamaquoddy, l’abénaki, le delaware, le shawnee, le powhatan (connu comme la langue de Pocahontas, parlée en Virginie), le pamlico, le fox-sauk-meskaki, l’ojibway, le cree, l’innu (montagnais), le potawatomi, le menominee, le cheyenne, le blackfoot, l’atsina, proche parent de l’arapaho, et beaucoup d’autres. Toutes ces langues sont à leur tour apparentées de façon plus lointaine à deux langues de Californie, le yurok et le wiyot, formant ainsi la famille « algique ». C’est l’ojibway (ou chippewa, anishinaabemowin) et ses nombreux dialectes, ainsi que le cree, qui restent les langues les plus parlée de cette famille.
Le peuple Arapaho est constitué de deux grandes tribus : les Arapaho du Nord, vivant dans le Wyoming, et les Arapaho du Sud, qui se sont unis avec leurs alliés de toujours, les Cheyenne, pour former la nation Cheyenne-Arapaho dans l’Oklahoma. Les Arapaho du Nord sont au nombre de 6000, et la nation Cheyenne-Arapaho comptent environs 11000 personnes.
Une autre tribu, les Gros Ventre du Montana, sont en réalité un groupe émigré d’anciens Arapaho, et leurs langue et culture sont donc très semblables à celle des Arapaho. De nombreux autres sous-groupes Arapho ont également fusionné avec les Arapaho du Nord et du Sud, comme les Nawathi’neha, les Besawunenaa ou encore les Ha’anahawunena.
Bien que d’autres tribus célèbres comme les Sioux, les Shoshone ou les Pawnee considéraient les Arapaho comme de formidables guerriers, l’histoire occidentale a plutôt retenu des Arapaho qu’il s’agissait d’un peuple pacifique, car ils n’auraient jamais essayé de se battre contre les colons. Malheureusement, leur stratégie consistant à passer des traités avec l’envahisseur au lieu de leur résister ne leur a pas rendu grand service, et l’installation en masse de colons sur des terres que les traités avaient pourtant réservé aux Arapaho ont forcé ces derniers à fuir leurs terres sacrées et à séparer leur tribu en deux. Une partie, qui devinrent les Arapaho du Sud, s’unirent donc aux Cheyenne en une seule tribus qui devint victime d’un des pire massacres de l’histoire américaine, celui de Sand Creek en 1864. Les Arapaho du Nord, quant à eux fuirent vers ce qui deviendra plus tard le Wyoming, et conclurent un traité avec leurs anciens ennemis les Shoshone leur permettant de pouvoir s’installer sur ces terres.
Précisions linguistiques
L’arapaho est un langue polysynthétique, comme tant d’autres en Amérique du Nord, munie de très longs mots qui combinent de nombreux morphèmes. Dans la famille algonquine, c’est sans doute celle qui s’écarte le plus du « type » algonquin, c’est à dire du proto-algonquin reconstitué. Son évolution phonétique profonde fait qu’elle ne semble plus algonquine du tout. Seul l’atsina (nommée souvent « gros-ventre » dans la littérature anglo-saxone) lui ressemble vraiment, à tel point que les langues sont largement inter-compréhensibles.
L’arapaho qui connaît une harmonie vocalique, comme le hongrois, le finnois ou encore le turc, qui joue un grand rôle dans la morphologie de la langue.
Extraits
Premier article de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme en arapaho (via le site omniglot.com) :
Beisiihi’ hineeniteeno’ tohcebii’oo3i’ beehni’iine’etii3i’, beehnii3inou’u nuhu’ neneehiisou’u niihenehiitoono noh bobooteenetiit. Heetnookohuusniini’iheti3i’ wootii hiniito’eino hookoh niini’kokoh’u3ecoo3i’ noh hee’eihi3i’.
(Traduction : tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité.)
Sources, liens et bibliographie
Andrew Cowell, Alonso Moss, The Arapaho Language, 2008
Andrew Cowell, Alonso Moss, William C’Hair, Arapaho Sories Songs and Prayers, 2014
Virginia Cole Trenholm, The Arapaho, our People, 1970
Cowell, Andrew; Moss, Alonzo, Sr. The Arapaho Language, University Press of Colorado, 2008
Greymorning, Steven, Reflections on the Arapaho Language Project, In Ken Hale and Leanne Hinton (eds.). The Green Book of Language Revitalization in Practice. San Diego, California: Academic Press.), 2001
Zdeněk Salzmann, The Arapaho Indians: A Research Guide and Bibliography (Bibliographies & Indexes in Anthropology), Greenwood Press, 1988
Sites web et dictionnaires en ligne :
https://verbs.colorado.edu/arapaho/public/view_search
https://www.colorado.edu/csilw/arapahoproject/language/dictionary/dic_frame2.html
http://www.native-languages.org/arapaho.htm