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L’itonama
Données collectées par l’UNICEF
Données sur la langue itonama
Noms alternatifs : sihnipadara, machato, saramo
Classification : L’itonama est généralement considéré comme un isolat. Toutes les études réalisées pour rapprocher l’itonama d’autres langues ou familles de langues (les langues paez nottament) sont demeurées non-concluantes pour le moment
Aire géographique : Bolivie, Département du Béni. Jusque dans les années 60 il y avait des locuteurs dans les municipalités de Magdalena, San Ramón et Huacaraje. Il semblerait qu’il n’y ait plus de locuteurs qu’à Magdalena, près de la rivière Itonama.
Nombre de locuteurs : La population Itonama s’élève à 2791 personnes selon PROEIB (2000), mais Crevels (2010) suggère qu’il ne resterait plus que deux locuteurs très âgés de la langue. Il est possible que d’autres personnes aient une connaissance partielle de la langue, mais la population Itonama est presqu’exclusivement monolingue en espagnol.
Statut de la langue : Selon les termes du décret suprême 25894 du 11 septembre, approuvé en l’an 2000, l’itonama est une des langues « indigènes reconnues comme officielles » en Bolivie.
Vitalité et Transmission : La langue est au bord de l’extinction. Il est même possible qu’elle soit déjà éteinte, les derniers locuteurs étant très âgées. Le peu de locuteurs restant ne parlent même pas la langue entre eux, elle n’est plus utilisée. Dans les années 60 on comptait encore une centaine de locuteurs bilingues itonama/espagnol.
Jusqu’à très récemment l’itonama était peu étudié. Le travail de Crevels depuis le début du 21ème siècle constitue un apport scientifique précieux pour mieux connaitre cette langue. Néanmoins son extinction prévisible risque de laisser de grandes zones d’ombres, sur la question de sa classification notamment.
Précisions historiques
Avant d’être contacté par les Jésuites les Itonama pratiquaient l’agriculture, la pêche et la chasse ainsi qu’une collecte de complément. En 1704 le Père Lorenzo Legarda parle d’environ 6000 Itonama, répartis dans une vingtaine de communautés.
Il est difficile d’attribuer l’état alarmant dans lequel se trouvent les langues de l’est bolivien, et de l’Amazonie bolivienne aujourd’hui à un seul facteur. L’arrivée des conquistadors dans cette région au 17ème siècle marque sans doute le début de leur déclin. Au cours du 18ème se sont le développement des Missions Jésuites, convertissant en masse et niant les cultures indigènes qui ont lancé les processus de colonisations et d’acculturations. En 1767, leur expulsion n’a pas changé la donne, les populations indigènes étant traitées de manière inhumaine par les institutions coloniales, puis étatiques à la fondation de la République bolivienne.
La fièvre du caoutchouc, au tournant du 20ème siècle, a vu le milieu amazonien ravagé et les communautés qui y vivaient ont souvent souffert de violents conflits avec les exploitants. Durant la guerre du Chaco, dans les années 1930, les jeunes indigènes du Béni ont été réquisitionnés par l’état Bolivien. Ils ont payé un lourd tribut à cette guerre qui a fait 50 000 morts du côté bolivien.
La réforme éducative de 1952 a sans doute été le coup de grâce décisif à la vitalité des langues indigènes du Béni. L’arrivée de l’école obligatoire monolingue en espagnol et la dépréciation des langues autochtones qui l’accompagnait ont provoqué l’abandon de la langue ancestrale au profit de la langue de scolarité, l’espagnol. Les communautés ont dû alors faire face au dénigrement de leur langue et se battre contre la représentation négative qui leur était partout imposée, pour maintenir leur langue active et continué à la transmettre. Bien peu y sont parvenues. Le cas de l’itonama n’est donc, hélas, pas un cas isolé, il s’agît seulement d’une des langues ayant les plus soufferts de cet ensemble de facteur.
Pour plus d’information sur les Itonama, voir les pages qui leurs sont consacrées sur le site Amazonia.bo (en espagnol).
Sources
Crevels, Mily (2010) Bolivia Amazónica In « Atlas sociolingüístico de pueblos indígenas en América Latina », UNICEF. Tome 1, pp 281-300.
Fabre, Alain. 2005. Diccionario etnolingüístico y guía bibliográfica de los pueblos indígenas sudamericanos. Consultable en ligne [20/04/2011]
Sources en ligne
Données collectées par l’UNICEF sur l’itonama [24/05/2011]
Page consacrée à l’itonama sur le site de Linguamón [24/05/2011]
Bibliographie complémentaire
Aulo Malala, Ignacio et al. 2003. Guía del alfabeto itonama. La Paz: Ministerio de Educación, Viceministerio de Educación Escolarizada y Alternativa.
Crevels, Mily. 2002. Itonama o sihnipadara, lengua no clasificada de la Amazonía boliviana. Estudios de Lingüística, 16: 1- 56. Alicante: Universidad de Alicante. Consultable en ligne.
Crevels, Mily 2002. Why speakers shift and languages die: an account of language death in Amazonian Bolivia. ILLA 3: 9-30. Leiden.
Crevels, Mily 2007. « La jerarquía de indexicalidad y voz en Itonama ». En: A. Romero- Figueroa, A. Fernández-Garay & Ángel Corbera Mori (eds.), Lenguas indígenas de América del Sur. Estudios descriptivo-tipológicos y sus contribuciones para la lingüística teórica. Caracas: UCAB.
Voir l’Atlas sociolingüístico de pueblos indígenas en América Latina et Fabre (2005) pour une bibliographie plus complète.
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