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Le yuracaré
Données collectées par l’UNICEF et le programme DoBes
Données sur la langue yuracaré
Noms alternatifs : yurakaré, yura, yurujure
Principaux dialectes : Selon Van Gijn (2006), bien qu’il existe un certain degré de variation au sein des différentes communautés de locuteurs, il n’y a pas, à proprement parler, de dialectes du yuracaré.
Classification : Le yuracaré est généralement considéré comme un isolat.
Des propositions, pour le moment non-concluantes, ont été faites pour le rapprocher de langues géographiquement proches, comme le mosetén, l’itonama ou le cayuvava ainsi que des langues quechuas.
Aire géographique : Bolivie, Départements de Béni, Province de Moxos et de Cochabamba, Provinces de Chapare et de Carrasco.
Les Yuracarés vivent éparpillés sur un territoire assez vaste compris entre les rivières Isíboro et Securé au nord-ouest et Mamoré et Ichílo à l’est-sud-est ; le long des bassins des rivières Chimore, Chapare et Ichoa.
Nombre de locuteurs : Selon le recensement bolivien de 2000 il y aurait 1809 locuteurs de yuracaré sur une population ethnique de 2809 personnes. L’UNESCO donne le chiffre de 2675 locuteurs et DoBes donne une estimation d’environ 2500 locuteurs.
Statut de la langue : Selon les termes du décret suprême 25894 du 11 septembre, approuvé en l’an 2000, le yuracaré est une des langues « indigènes reconnues comme officielles » en Bolivie.
Enseignement : le yuracaré est présent dans l’éducation scolaire locale qui est bilingue dans les premières années de l’école primaire, avant de devenir progressivement monolingue en espagnol.
Vitalité et Transmission :
Le yuracaré est une langue en danger selon les critères de l’UNESCO.
Une rupture de la transmission a eu lieu il y a 15-20 ans, tous les locuteurs natifs sont donc âgés de plus de 30 ans. Et même parmi la dernière génération de locuteurs natifs, l’usage de l’espagnol est préféré. La quasi-totalité des locuteurs sont bilingues en espagnol. Il resterait 519 locuteurs monolingues, mais selon Crevels (2010) ces chiffres doivent être maniés avec précaution, la réalité est probablement moindre.
Les plus jeunes générations se sont approprié les stéréotypes négatifs entourant leur identité ethnique qui ont longtemps été véhiculé par la société métisse bolivienne, ce qui pourrait expliquer ce dramatique et rapide déclin de la langue.
Précisions historiques
Les premières mentions des Yuracarés dans la littérature coloniale remontent au 16ème siècle. Ils vivaient probablement à cette époque plus au sud qu’actuellement, près de l’actuelle ville de Santa Cruz de la Sierra.
Il est difficile de savoir s’ils ont été, ou non, placé sous la dépendance des incas au temps de l’expansion coloniale andine. Lors des migrations guaranis du 16ème siècle, ils sont restés suffisamment distant pour ne pas être réduit en esclavage et ont ainsi échappé à l’assimilation qu’ont subie les Chanés, par exemple.
L’arrivée des espagnols a créé des changements considérables dans l’environnement de la région, particulièrement après la fondation de Santa Cruz de la Sierra. Les Yuracarés ont été contraint à se déplacer et à s’isoler pour survivre, ce qui les a rendus relativement imperméable à la pénétration des missions jésuites dans la région. Globalement la population Yuracaré a été plus imperméable à l’action des différents missionnaires qui se sont succédé que les autres populations voisines. Depuis les années 50, cependant, les New Tribe Mission ont réussi à s’implanter durablement au sein de certaines communautés.
A cette période, l’ouverture de la route de Cochabamba à Santa Cruz a amené des paysans et des anciens mineurs des Andes à s’installer dans la région, rasant la forêt pour transformer les terres en zones agraires ou en production de caoutchouc et surtout pour la plantation de la coca et le trafic de drogue. Ce mouvement continue de nos jours, réduisant toujours un peu plus l’espace de vie des Yuracarés et les obligeant à se déplacer constamment. Mais surtout, cela a conduit d’autres ethnies à se déplacer vers les territoires occupés par les Yuracarés.
Précisions ethnographiques
Situés à la jonction des hautes et basses terres, les Yuracarés se trouvent à la jonction de deux, voire trois grands ensembles culturels : les cultures andines de l’ouest, les cultures amazoniennes de l’est et la région du Chaco au sud-est. Ils partagent des traits culturels avec chacune de ces trois typologies culturelles, bien qu’ils aient un mode de vie plus proche des populations des basses terres amazoniennes.
Traditionnellement l’économie des Yuracarés reposait sur une agriculture sur brûlis, et sur la chasse, la pêche et la cueillette. Cette économie a tendance à disparaître de nos jours et les Yuracarés sont de plus en plus contraints de travailler comme ouvrier agricole dans les plantations, de Coca notamment.
Les villages étaient traditionnellement très éclatés, avec des maisons non-permanentes assez éloignées les unes des autres. Ces villages sont des regroupements de quelques familles. La famille nucléaire est l’unité sociale de base et sont très indépendantes. Un village est un regroupement de plusieurs familles, mais ces regroupements sont en recomposition constante. Les Yuracarés font ainsi preuve d’une grande mobilité qu’il ne faut pas confondre avec un nomadisme de subsistance.
Actuellement, sous l’influence de la société occidentale et des missionnaires, les population sont plus sédentaires, et les villages plus peuplés et plus concentrés. Ils ne restent plus grand-chose de la mythologie traditionnelle et beaucoup de pratiques culturelles ont été abandonnées au cours des 50 dernières années.
Les communautés d’autres ethnies indigènes vivant sur le territoire des Yuracarés sont de plus en plus nombreuses. Dans les provinces de Cochabamba, les Yuracarés fréquentent surtout les Quechuas. Dans le département de Beni, ils sont en contact permanent avec les Trinitarios (qui parlent une langue de la famille arawak), et même des alliances matrimoniales ont lieu entre ethnies.
Pour plus d’informations sur les Yuracarés, voir le site du programme DoBes.
Sources
Crevels, Mily (2010) Bolivia Amazónica In « Atlas sociolingüístico de pueblos indígenas en América Latina », UNICEF. Tome 1, pp 281-300.
Fabre, Alain. 2005. Diccionario etnolingüístico y guía bibliográfica de los pueblos indígenas sudamericanos. Consultable en ligne [20/04/2011]
Sources en ligne
Données collectées par l’UNICEF sur le yuracaré [20/04/2011]
Pages consacrées au yuracaré sur le site du programme DoBes [20/04/2011]
Page consacrée au yuracaré sur le site de Linguamón [20/04/2011]
Pages du site Amazonia.bo consacrées aux Yuracarés [20/04/2011]
Bibliographie complémentaire
Van Gijn, Rik (2006) A Grammar of Yurakaré. PhD. thesis Nijmegen: Radboud Universiteit. Consultable en ligne.
Voir l’Atlas sociolingüístico de pueblos indígenas en América Latina et Fabre (2005) pour une bibliographie plus complète.
Si vous avez des informations complémentaires sur cette langue n'hésitez pas à nous contacter : contact@sorosoro.org