Imprimer |
Le kinyindu
Page réalisée par MUSOMBWA IGUNZI Michel, NDAHASHUBA, Coordinateur principal de l’Association pour la Survie de l’Héritage culturel du Peuple Autochtone Nyindu (A.S.H.P.A.N.), 2010.
Griot Male’Mbee jouant de la music Nyindu avec ses deux collaborateurs, sur des instruments musicaux traditionnels : les likimbi. Les marmites sur lesquelles sont posés les likimbi servent d’amplificateurs de son. Le son de la bouteille vide sur laquelle l’un des hommes frappe sert d’accompagnement (©Takako YAMADA).
Données sur la langue
Noms alternatifs : nyindu
Classification : famille Niger-Congo, branche bantu, groupe J
En ce qui concerne la branche ou le sous-groupe auquel appartient notre langue le kinyindu, un document de recherche disponible auprès de l’Institut Supérieur Pédagogique (I.S.P., Bukavu, 2005) mentionne ceci : « à part les langues qui ont été classifiées par M. Guthrie dans le groupe 50 le kinyindu porte la mention J 56 ».
On peut voir également, l’ouvrage de J. M. Wikaliza « A glimpse at Kinyindu Phonology » Institut Supérieur Pédagogique (I.S.P.), Bukavu, 2005). Un rapport de recherche soumis dans le cadre d’un travail de fin de cycle requis pour l’obtention du Diplôme de Graduat en Enseignement de la langue Anglaise.
Principaux dialectes :
Le kilifuru, toutefois considéré comme une autre langue à part, est parlé par les Bafuliru qui se reconnaissent comme étant des originaires de Lwindi et aussi comme étant des petits frères des Banyindu.
Le Pasteur Kadogo Mujumbi, un octogénaire autochtone Nyindu expérimenté dans les questions liées au kinyindu souligne que le kilifuru est issu d’un mélange entre la langue telle que les Balifuru l’on amené en quittant Lwindi et les dialectes qu’ils ont rencontrés dans la plaine de la rivière Ruzizi. Le kifuliru n’est pas parlé à Lwindi.
Il mentionne à titre d’exemple que, alors qu’à Lwindi, les autochtones Banyindu appellent une colline « mumana », les Bafuliru l’appellent « mugazi ». Ce dernier mot est absolument étranger au kinyindu dit-il, comme c’est le cas avec beaucoup d’autres mots appartenant au kifuliru.
Aire géographique :
Actuellement, l’aire géographique reconnue comme terroir des Banyindu se trouve environ autour de la latitude – 2.95 et de la longitude 28.55, après le zoom sur l’Est de la République Démocratique du Congo, la province du Sud Kivu, en territoire de Mwenga (cf. carte disponible sur le site de l’Unesco).
L’aire géographique de la langue étant située dans, et autour du triangle formé par les villages de Kasika – Kigogo – Ilangi (les limites administratives de la collectivité de Lwindi peuvent être vues sur la carte administrative du territoire de Mwenga). Quoique jadis les populations qui vivaient dans toute cette partie parlait la langue de leur ancêtre commun Nabatwa, le kinyindu, aujourd hui la langue se retrouve entrain de s’effacer totalement, graduellement et rapidement. Seule une petite minorité utilise aujourd’hui la langue.
Nombre de locuteurs :
3 500 personnes.
Les statistiques disponibles auprès du Ministère de l’Intérieur de la Province du Sud-Kivu font état de 17 838 habitants pour la Collectivité Chefferie de Lwindi, terroir du Peuple Autochtone Nyindu. Au sein de cette population, seulement 2 000 parle le Kinyindu. Ce groupe de locuteurs comprend essentiellement les vielles personnes, âgées de 45 ans ou plus.
Les 1 500 personnes de plus sont celles des groupuscules d’autochtones Nyindu vivant en de très petites communautés de 20 à 50 ménages éparpillés à travers la Province du Sud-Kivu et au sein desquels les personnes âgées s’expriment occasionnellement en kinyindu.
Statut de la langue :
Langue vernaculaire
Vitalité et Transmission :
L’âge moyen des locuteurs, tourne autour de 45 ans. La grande majorité des enfants et jeunes gens ne connaissent pas la langue, car elle n’est plus parlée que dans des très rares familles dont le nombre décroît année après année.
Médias /Littérature/Enseignement :
La langue est absente des médias, de la littérature (aucun ouvrage écrit en kinyindu n’est disponible dans les bibliothèques et librairies), et de l’enseignement tant publique que privé, formel ou informel.
Précisions historiques
Le règne du premier Mwami Nalwindi Nabatwa à la dynastie duquel appartient l’actuel Mwami de Lwindi remonte à 1482.
Cette date n’indique pas un début de l’existence de la communauté des Banyindu, mais seulement une indication sur la dynastie de celui au nom duquel jurent jusqu’aujourd’hui tous les Batumba – le clan dirigeant chez les Banyindu.
En effet, il est un fait que lorsqu’un autochtone Nyindu se heurte à un obstacle on l’entend jurer comme pour invoquer en Kinyindu, et nous citons : « Ko Nga’fa daata wa’nabatwa ! ». Ceci signifiant : « voit comme je meurs » ou plutôt « au secours notre ancêtre Nabatwa ».
Et le nom « Nabatwaa » signifie « Père/Géniteur des Batwa ».
Précisions ethnographiques
Chasseurs Nyindu, Photo prise par Takako
Il est admis, parmi toutes les autres communautés traditionnelles qui entourent la communauté des Banyindu, que ceux-ci sont une population autochtone. Il est aussi communément admis que la plupart des communautés environnantes tirent leur origine à Lwindi.
Il n’est pas rare d’entendre des membres de la communauté des Bashi dirent qu’ils tirent leur origine de Lwindi ou encore des Banyindu (cf. la citation tirée du très connu livre Enanga za Bashi ci-dessous).
Les Bafuliru qui vivent actuellement dans la plaine de la Ruzizi se reconnaissent comme étant des originaires de Lwindi et aussi comme étant des petits frères des Banyindu.
Jusqu’à ce jour, la majeure partie des Bami traditionnels de la région reconnaissent au Chef traditionnel de Lwindi la qualité de Na’Lwindi Kinyabami, signifiant le Chef traditionnel de Lwindi, Père des Chefs traditionnels.
Précisions sociolinguistiques
Une des causes qui expliquent le danger de disparition que court la langue du Peuple Autochtone Nyindu, est la confusion qui entoure sa véritable identité dans les esprits de certaines personnes, y compris certains chercheurs.
Alors qu’il est définitivement établi que la culture des Bashi est très différente de celle des Lega – les deux tribus majoritaires de la Province du Sud-Kivu – il n’est pas rare de rencontrer des gens, et voire même des documents qui qualifient la langue comme une langue des Bashi et encore d’autres qui la qualifie plutôt d’une langue des Barega. Le fait relève d’une confusion flagrante dont la culture du Peuple autochtone Nyindu est le grand perdant. Et la langue – le kinyindu – de même.
À titre d’illustration, les Nyindu (ou Banyindu) se retrouvent omis sur bien des sites qui pourtant se veulent mentionner toutes les tribus (ou ethnies africains). C’est le cas du site ezakwantu.com qui mentionne à la date d’aujourd’hui plus de 7 400 tribus parmi lesquelles la mention Nyindu ne se retrouve pas.
Entre autres citons aussi le site Wikipedia qui contient une « liste des groupes ethniques d’Afrique ».
Précisions linguistiques
Le Kinyindu est une langue bantu. Par ailleurs, il s’agit d’une langue à tons et il n’y est pas facile de prononcer un mot correctement sans recourir à un ton approprié et c’est ce ton qui confère le sens au mot. La montée ou la chute de la voix dans la parole affecte le sens de ce qui est dit.
Quelques mots en kinyindu: proverbes
- ake’ba muguma ili anyali mugumana
litt. « Il peut etre seul, mais en bonne santé »
= ce qui fait la force d’un groupe ce n’est pas le nombre qui le compose mais sa viabilité.
- bugale ho bwanga ku zindana butaku tange
litt. « La richesse, il est bon qu’elle vous arrive à la fin, au lieu qu’elle vous arrive au début »
= Il est préferable de finir dans l’abondance que de débuter dans elle et finir dans la misère.
Sources & bibliographie
NKORANYI R. (1984) Ennaga z’e Bushi : Abami I, Collection Culturelle et Christianisme
BETU, K. (2001), « The contrastive analysis of English and Kinyindu noun phrase.«
Thèse de Licence, non publiée, disponible à l’ISP BUKAVU.
KIKITUMAINI, M, (1999). « The morphology of Kinyindu : Nominal and verbal forrns.«
Thèse de Licence, non publiée, disponible à l’ISP BUKAVU.
KEKE, M., « les Banyindu » in Actes du colloque sur la Géographie Pysique et humaine du Kivu: CERUKI- BUKAVU
CERUKI : Centre des Recherches Universitaires du Kivu, base à Bukavu.
Research paper by J. M. WIKALIZA « A glimpse at Kinyindu Phonology » Institut Supérieur Pédagogique (I.S.P.) Bukavu, 2005.
Liens
Rapport sur l’ethnobotanique nyindu dans l’Est du Zaïre (en anglais) : http://ci.nii.ac.jp/naid/110000066187/en/
Page wikipédia (en anglais) sur les langues bantu : http://en.wikipedia.org/wiki/Great_Lakes_Bantu_languages
Si vous avez des informations complémentaires sur cette langue n'hésitez pas à nous contacter : contact@sorosoro.org