Imprimer |
Famille des langues iroquoianes
Données sur les langues iroquoianes
Où sont parlées les langues iroquoianes ?
Ces langues sont parlées par des peuples autochtones d’Amérique du Nord, dans les provinces canadiennes de l’Ontario et du Québec, et dans les états de l’Oklahoma, de New York, du Wisconsin et de la Caroline du Nord, aux Etats-Unis
Qui parle ces langues ?
Les locuteurs de langues iroquoianes sont des membres des « Premières Nations » nord-américaines, qui habitaient la région bien avant l’arrivée des Européens et la création des Etats-Unis et du Canada.
Nombre total de locuteurs (estimation) :
Environ 14 000 selon l’UNESCO
Environ 25 000 selon le site ethnologue.com (SIL)
Classification
La famille des langues iroquianes compte à ce jour 7 langues.
Branche iroquoiane Sud
Cherokee : 11 000 locuteurs selon UNESCO et 22 000 selon SIL
Branche iroquoiane Nord
Groupe tuscarora-nottoway
Nottoway : éteint selon UNESCO
Tuscarora : 3 locuteurs selon UNESCO et 11 à 13 selon SIL
Groupe proto-lake iroquois
Huron-Wyandot : éteint
Laurentien : éteint
Ensemble « Five Nations »
Onondaga : 50 locuteurs selon UNESCO
Sous-groupe seneca-cayuga
Cayuga : 50 à 70 locuteurs selon SIL
Seneca : 100 locuteurs selon UNESCO et 200 selon SIL
Sous-Groupe oneida-mahawk
Mohawk : 3 000 locuteurs selon UNESCO et SIL
Oneida : 250 & locuteurs selon UNESCO et SIL
Commentaires sur la classification des langues iroquoianes :
Le proto-iroquois, la langue ancêtre, commune à toutes ces langues, est probablement originaire des Grands Lacs. La séparation entre les branches sud et nord pourrait avoir eu lieu aux alentours de -1800 à -1500. Le cherokee est aujourd’hui le seul représentant de la branche sud.
Certains linguistes ont proposé de relier les langues iroquoianes avec les langues caddoanes ou avec les langues algiques, ces trois langues étant géographiquement proches. Toutefois, ces propositions n’ont pour le moment pas été linguistiquement justifiées, et ne sont donc pas acceptées par la majorité des experts.
Plusieurs autres langues, des isolats géographiquement proches, ont été reliées de manière hypothétique à la famille iroquoiane. On trouve parmi celles-ci le meherrin, dans le sud-est des Etas-Unis, l’erie, le wenro et le petun, parlées dans l’ouest de l’Etat de New-York, et dans l’Ontario. Cependant, le manque de matériel et d’études approfondies disponibles rend la classification précise de ces langues impossible.
Les langues iroquoianes sont-elles en danger ?
Oui. Le laurentien et le nottoway sont des langues a priori éteintes. Le huron-wyandot et le tuscarora sont également très proches de l’extinction, si elles n’ont pas déjà disparu.
Le seneca, le cayuga, l’onondaga et l’oneida ont un nombre de locuteurs oscillant entre quelques dizaines et une centaine, tous âgés, les langues n’étant plus transmises aux jeunes générations. Ils sont donc considérés comme étant « en situation critique » par l’UNESCO.
Avec quelques milliers de locuteurs natifs, le mohawk et le cherokee peuvent sembler être en situation moins critique, mais là aussi la transmission aux jeunes générations se fait de moins en moins, au profit de l’anglais, et ces langues sont elles-aussi menacées de disparition dans les décennies à venir.
Eléments ethnographiques
Comment vivaient les locuteurs des langues iroquoianes avant la colonisation ?
Malgré une certaine diversité culturelle entre les différents peuples, les locuteurs des langues iroquoianes partagent certains traits culturels: contrairement aux clichés concernant les Amérindiens d’Amérique du nord, ils n’étaient pas nomades. Au contraire, ils vivaient dans des villes ou des villages, fortifiés par des palissades en bois. Au sein de ces villages, les gens habitaient dans des « maisons communes » pouvant abriter jusqu’à une cinquantaine de personnes. Ces sociétés étaient essentiellement agricoles, avec une agriculture centrée sur le mais et les céréales. Les cherokees construisaient des tumulus funéraires pour enterrer leurs morts.
Comment étaient-ils organisés ?
Chaque village était autonome, et chaque maison communautaire correspondait en général à un clan (une alliance de familles). Les clans étaient matrilinéaires, c’est-à-dire que l’appartenance à un clan était déterminée par la mère. Chacune des familles cherokees possédait sa propre parcelle de terre cultivable, mais ces parcelles étaient rétrocédées à la communauté si la famille disparaissait. Les villages étaient déplacés tous les vingt ans environ pour permettre une régénération des sols appauvris par l’agriculture.
Qu’est-ce que la confédération des nations iroquoises ?
Le nom « Iroquois » (dont les origines sont disputées) a été donné par les français aux membres de 6 différentes nations (5+1) qui se nomment eux-mêmes Haudenosaunee : « Ceux qui construisent des « maisons communes ». A l’origine, il s’agissait d’une confédération de cinq nations amérindiennes, dont la date de création est disputée mais très ancienne ; elle pourrait remonter à une éclipse solaire au XIIème siècle: Seneca, Cayuga, Onondaga, Oneida, Mohawk. Ces nations ont été rejointes plus tard par les Tuscarora chassés de Caroline après une guerre contre les colons européens entre 1711 et 1713. Il a été suggéré que la constitution ayant donné naissance à cette confédération aurait influencé la constitution des Etats-Unis d’Amérique…
Précisions linguistiques
Spécificités linguistiques des langues iroquoianes :
Parmi ces spécificités nous avons choisis de vous présenter le faible nombre de sons, le système agglutinant de construction des mots et le système d’écriture cherokee.
L’ensemble des sons (inventaire phonologique) utilisé par les langues iroquoianes est généralement petit, par exemple le cayuga n’utilise que 10 consonnes (t, k, ts, s, n, r, w, y, h, ʔ) et 6 voyelles (i, e, a, o, ᶓ , ǫ). Cet inventaire un peu particulier est ce qui a permis l’invention de l’écriture cherokee, comme nous allons le voir par la suite.
Prenons comme exemple un mot en tuscarora :
waʔkhetaʔnaratyáʔthahθ qui signifie « j’ai acheté du pain pour elle »
On pourrait « décomposer » ce mot ainsi :
waʔ (passé)/ k (1ère PS)/ h (objectif)/ e (humain)/ taʔnar (« pain »)/ a (associatif) / tyáʔt (« acheter »)/ hahθ (datif + ponctuel)
Cet exemple illustre bien le fait que les langues Iroquioanes sont des langues polysynthétiques et agglutinantes, comme beaucoup d’autres langues autochtones d’Amérique. Cela signifie que les mots se forment à partir d’une racine lexicale qui porte le « sens » principal, et à laquelle on peut ajouter un certain nombre de de morphèmes grammaticaux appelés affixes, pour associer à cette racine lexicale des indications d’ordre grammatical. Les mots sont donc composés de diverses parties d’une phrase soudées les unes aux autres et l’on est souvent obligé de traduire ces mots par une phrase complète en français.
Il existe une écriture syllabaire propre au cherokee. C’est une écriture basée sur des syllabes et non sur la correspondance ‘un signe = un son’, comme dans l’alphabet latin, par exemple. Cette écriture a été inventée en 1819 par un cherokee du nom de Sequoyah, qui ne parlait pas anglais. Cette écriture est toujours utilisée de nos jours par certaines communautés cherokees. De ce fait, il y existe une littérature cherokee assez importante pour une langue amérindienne, dont le « Cherokee Phoenix », journal écrit en cherokee et publié entre 1828 et 1834.
A titre d’exemple, voici comment on écrit le mot ditiyohihi en syllabaire cherokee : ᏗᏘᏲᎯᎯ.
On pourrait traduire littéralement ce mot ainsi : « il argumente répétitivement et opiniâtrement avec un objectif ». C’est le mot Cherokee pour « avocat ».
Sources :
Mithun, Marianne The languages of native North America. Cambridge, UK: Cambridge University Press. (1999).
Campbell, Lyle. American Indian languages: the historical linguistics of Native America. Oxford: Oxford University Press. (1997)
Site consacré aux langues amérindiennes :
http://www.native-languages.org/
Sites consacrés à la défense des langues et cultures autochtones du Canada :
Si vous avez des informations complémentaires sur cette langue n'hésitez pas à nous contacter : contact@sorosoro.org