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Famille des langues athabaskane-eyak-tlingit
Données sur les langues athabaskanes
Où sont parlées ces langues?
Elles sont parlées par des peuples autochtones d’Amérique du Nord, dans une très vaste zone géographique allant du nord-ouest de l’Amérique du Nord jusqu’à l’actuelle frontière mexicaine au sud : dans les provinces du Saskatchewan, du Yukon, de la Colombie Britannique et des Territoires du Nord-Ouest au Canada et dans les états de l’Alaska, de Washington, de l’Oregon, de Californie, de l’Arizona et de l’Oklahoma aux Etats-Unis.
Qui parle ces langues ?
Les locuteurs de langues athabaskanes sont des membres des « Premières Nations » nord-américaines, qui habitaient la région bien avant l’arrivée des Européens et la création des Etats-Unis et du Canada. De nos jours, la plupart des locuteurs habitent dans des réserves au Canada et aux Etats-Unis.
C’est la famille de langues autochtones d’Amérique du Nord qui s’étend sur le plus grand territoire et comprend l’un des plus grands nombres de langues et de locuteurs.
Nombre Total de Locuteurs (estimation)
Environ 150 000 selon l’UNESCO
Environ 170 000 selon le site ethnologue.com (SIL)
Classification
La famille des langues athabaskanes compte à ce jour 29 ou 33 langues, selon les sources.
Sous-famille athabaskane du nord
Branche Alaska sud
Ahtna (noms alternatifs: atna; ahtena; copper river) : 25 locuteurs selon UNESCO et 80 selon SIL (1994)
Tanaina (nom alternatif : dena’ina) : 25 locuteurs selon UNESCO et 75 selon SIL (1997)
Branche Alaska centre et Yukon
Deg Hit’an (nom alternatif : ingalik) : 14 locuteurs selon UNESCO (2000) et 20 à 30 selon SIL (1997)
Gwich’in (noms alternatifs : kutchin, loucheux, takudh) : 150 locuteurs selon UNESCO (2000) et 730 selon SIL (1998)
Han (noms alternatifs : moosehide, dawson) : éteinte selon UNESCO et 14 locuteurs selon SIL (1995)
Holikachuk (nom alternatif : innoko) : 5 locuteurs selon UNESCO (2000) et 12 selon SIL (1995)
Koyukon (nom alternatif : tena) : 150 locuteurs selon UNESCO (2000) et 300 selon SIL (1995)
Haut kuskowim (nom alternatif : kolchan): 25 locuteurs selon UNESCO (2000) et 40 selon SIL (1995)
Tanacross : 35 locuteurs selon SIL (1997) et 50 selon UNESCO (2000)
Bas tanana (nom alternatif: tanana, minto) : 15 locuteurs selon UNESCO (2000) et 35 selon SIL (1995)
Haut Tanana : 55 locuteurs selon UNESCO (2000) et 155 selon SIL (1995)
Tutchone : 190 locuteurs selon UNESCO (2000) et 220 selon SIL (1995)
Branche Canada nord-ouest
Beaver : 195 locuteurs selon UNESCO (2001) et 300 selon SIL (1995)
Chipewyan : 8 195 locuteurs selon UNESCO (2001) et 4000 selon SIL (1995)
Dogrib : 1 675 locuteurs selon UNESCO (2001) et 2 110 selon SIL (2001)
Sekani : 75 locuteurs selon UNESCO (2001) et 30 à 40 selon SIL (1995)
Slave(y)-hare-bearlake-mountain : 1 640 locuteurs selon UNESCO (2001) et 790 selon SIL (1995)
Thaltan-Tagish-Kaska (nom alternatif : nahanni) : 155 locuteurs selon UNESCO (2001) pour la seule langue kaska et 437 selon SIL (1995)
Branche Colombie Britannique centre
Babine-witsuwit’en : 500 locuteurs selon SIL (1995)
Carrier : 660 locuteurs selon UNESCO (2001) et 2 000 selon SIL (1987)
Chilcotin : 560 selon UNESCO (2001) et 2 000 locuteurs selon SIL (2001)
Isolats:
Kwalhioqua-clatskanie : éteint
Sarcee (nom alternatif : tsuut’ina) : 75 selon UNESCO (2001) et 50 locuteurs selon SIL (1995)
Tsetsaut : éteint
Sous-famille athabaskane de la côte pacifique
Branche athabaskane de l’Oregon
Galice-applegate : éteint
Rogue river (E.D.) : éteint selon UNESCO (2000) et 10 locuteurs selon SIL (1962),
Tolowa : 1 selon UNESCO et 5 locuteurs selon SIL (1994)
Haut umpqua : éteint
Branche athabaskane de Californie
Eel river : éteint
Hupa (nom alternatif : hoopa-chilula) : moins de 12 selon UNESCO et 8 locuteurs selon SIL (1994)
Mattole-bear river : éteint
Sous-famille apache
Branche apache de l’ouest
Apache occidental : 14 000 locuteurs selon UNESCO et 12 600 selon SIL (1990)
Chiricahua-mescalero: 1 500 locuteurs selon UNESCO (2000) et 1 800 selon SIL (1977)
Navajo (noms alternatifs: navaho, diné) : 120 000 locuteurs selon UNESCO (2001) et 148 000 selon SIL (1990)
Branche apache de l’est
Apache des plaines (noms alternatifs : kiowa apache, na’isha) : 3 locuteurs selon UNESCO et 18 selon SIL (1990)
Jicarilla : 300 locuteurs selon UNESCO et 812 selon SIL (1990)
Lipan : éteint selon UNESCO (1981) et 2 ou 3 locuteurs selon SIL (1981)
Isolats
Eyak : éteint selon UNESCO (2008) et 1 locuteur selon SIL (1996)
Tlingit : 355 locuteurs selon UNESCO et 845 selon SIL (1995)
Commentaires sur la classification des langues athabaskanes-eyak-tlingit :
Les liens entre les différentes sous-familles (langues athabaskanes, langues apaches, et isolats -eyak et tlingit-) sont bien établis aujourd’hui, mais au sein de la sous-famille athabaskane la classification est moins stable.
Selon Mithun (1999), les langues de la branche pacifique sont plus un regroupement géographique qu’une véritable sous-famille linguistique. Le manque de documentation sur ces langues rend en fait un regroupement linguistique très difficile à établir et la classification peut varier selon les sources.
Les langues des branches canadiennes et alaska sont aussi extrêmement difficiles à classifier car le contact géographique a créé un système d’emprunt mutuel entre toutes ces langues, ainsi qu’avec des langues d’autres familles (les langues wakashanes, par exemple).
Le tutchane et le slavey sont des ensembles dialectaux dont les frontières peuvent varier selon les sources. Ethnologue.com compte deux langues distinctes pour chacun de ces deux ensembles. Nous avons ici suivi la classification établie par Mithun (1999), considérée comme largement consensuelle.
NB : on trouve dans différents ouvrages le nom « na-déné », qui désigne une famille hypothétique regroupant la famille athabaskane-eyat-tlingit et l’isolat haida. Mais désormais les liens entre cette famille de langues et le haida sont fortement remis en question par les linguistes qui attribuent les éventuels point communs à des contacts linguistiques, et à une méconnaissance du haida. C’est pour éviter toute confusion que nous n’avons pas utilisé ici ce nom « na-déné ».
NB2 : En 2008, Vajda a proposé un rapprochement entre ces langues et le yeniseian, un isolat de Sibérie. Cette théorie, si elle s’avérait fondée, serait un apport incontestable à la théorie des mouvements de populations via le détroit de Béring, lors de la dernière période glaciaire. Elle est considérée très prometteuse par la communauté linguistique, mais elle n’est pas encore globalement acceptée. Nous ne l’avons donc pas intégrée à notre classification pour le moment.
Plus d’information à propos de cette théorie, sur le site de l’université de Fairbanks, Alaska.
http://www.uaf.edu/anlc/dy.html
Les langues athabaskanes sont-elles en danger ?
Oui, toutes ces langues sont en danger.
Beaucoup de langues se sont éteintes au cours de la deuxième moitié du 20ème siècle et au début du 21ème siècle.
Les langues athabaskanes du Nord et l’isolat tlingit sont tous classés « en situation critique » par l’UNESCO : on ne compte plus que quelques centaines (voire moins), de locuteurs âgés, et les plus jeunes générations ont pour langue maternelle l’anglais ; elles risquent donc de disparaître au cours des décennies à venir, si rien de conséquent n’est fait pour les revitaliser.
Du côté des isolats, le tsetsaut, l’ensemble dialectal kwalhioqua-clatskanie et l’eyak sont éteints à ce jour.
Les langues athabaskanes de l’Oregon et de Californie sont également presque toutes éteintes. Le tolowa n’avait qu’un locuteur natif au début du siècle et on peut le considérer comme au bord de l’extinction ou éteint. Le hupa est donc probablement le dernier « survivant » de la sous-famille, mais avec moins d’une dizaine de locuteurs, tous âgés, il est probable qu’il s’éteigne à son tour dans les années à venir.
La majorité des langues apachéanes est dans la même situation. Seuls le navajo, et dans une moindre mesure l’apache occidental, sont moins menacés. Le navajo est, avec l’inuktitut, la langue amérindienne du nord possédant le plus de locuteurs.
Enfin, le lipan est probablement éteint aujourd’hui.
Eléments ethnographiques
Il n’y a absolument pas d’unicité culturelle au sein des locuteurs de ces langues. La distance géographique, les différents types d’environnements naturels et culturels qui séparaient, par exemple, les locuteurs d’ahtna au sud de l’Alaska et les locuteurs de lipan, à la frontière du Mexique, rendent toute généralisation culturelle impossible.
En revanche, on peut rapprocher le mode de vie des locuteurs de sekani, qui vivaient en Colombie Britannique avant la colonisation, de celui des tribus wakashanes voisines, bien que les langues wakashanes constituent une autre famille linguistique à part entière. Ils étaient chasseurs, pêcheurs et cueilleurs sédentaires et habitaient des maisons communautaires de bois. Leurs sociétés étaient très hiérarchisées et valorisaient la propriété privée, la prospérité individuelle mais aussi la générosité et la redistribution des biens. Ils suivaient le mode de vie typique du « nord-ouest ».
Avant la colonisation, les locuteurs de hupa pratiquaient un mode de vie au croisement de cette culture du « nord-ouest » et de la culture des tribus californiennes. Ils habitaient aussi de grandes maisons communautaires en bois et leur organisation sociale était proche des tribus du « nord-ouest », mais leur régime alimentaire et certains traits culturels, comme l’utilisation de «sweat lodge » (huttes de sudation rituelle) les rapprochaient des voisins tels que les Miwoks.
Les locuteurs des différentes branches de langues apaches, qui vivaient plus au sud, ne connaissaient pas non plus d’unicité culturelle.
Les Apaches des plaines étaient alliés aux Kiowas, dont ils partageaient le mode de vie semi-nomade et l’organisation sociale typique des « grandes plaines ».
Les Navajos, eux, vivaient dans une zone plus aride et leur mode de vie était légèrement différent : bien que semi-nomades (de façon saisonnière), ils pratiquaient l’agriculture. Leurs sociétés étaient « matrilinéaires » (l’appartenance au clan était déterminé par lamère), et « matrilocatives » (un homme habitait avec la famille de sa femme). Les femmes étaient celles qui possédaient les habitations et les terres. Ces habitations, appelées « hogan », étaient typiques de la région : en forme de dôme, elles étaient constituées d’une structure de bois recouverte de terre et de sable qui conservaient la fraicheur.
Sources
Mithun, Marianne. The languages of native North America. Cambridge, UK: Cambridge University Press. (1999).
Campbell, Lyle. American Indian languages: the historical linguistics of Native America. Oxford: Oxford University Press. (1997)
Si vous avez des informations complémentaires sur cette langue n'hésitez pas à nous contacter : contact@sorosoro.org
Fiches descriptives disponibles pour les langues suivantes au sein de cette famille :