Imprimer |
Famille des langues arawak
Où sont parlées les langues arawak ?
Cette famille est de loin la famille de langues amérindiennes du sud occupant la plus vaste zone géographique. Elles sont parlées en Amérique du Sud et en Amérique Centrale sur un territoire très vaste qui s’étend du Paraguay au Bélize en passant par la Bolivie, le Pérou, la Colombie, le Brésil, la Guyane Française, le Surinam, le Guyana et le Honduras.
De plus, des langues arawak étaient parlées à une époque antérieure dans toutes les Antilles et les îles du Golfe du Mexique.
Nombre total de locuteurs (estimation) :
Entre 500 000 et 530 000 selon les chiffres donnés par Alexandra Y. Aikhenvald (AA, 1999)
Classification
La famille des langues arawak compte à ce jour entre 53 et 59 langues actives selon les sources. C’est la famille qui compte le plus de langues en Amérique du Sud.
Sous-famille arawak du sud et du sud-ouest
Branche arawak du sud
Bauré: 55 locuteurs selon UNESCO et 5 000 selon AA
Moxo- Ignaciano : 5 000 locuteurs selon AA
Moxo-Trinitario : 5 000 locuteurs selon AA
Salumã (nom alternatif: enawenê-nawê) : 445 locuteurs selon UNESCO et 154 selon AA
Terêna: 19 000 locuteurs selon UNESCO et 9 800 selon AA
Branche pareci-xingu
Xingu
Mehinaku : 200 locuteurs selon UNESCO et 95 selon AA
Waura : 321 locuteurs selon UNESCO et 130 selon AA
Yawalapiti : 10 locuteurs selon UNESCO et 135 selon AA
Pareci-Saraveca
Pareci : 1000 locuteurs selon UNESCO et 600 selon AA
Branche arawak du sud-ouest
Piro (noms alternatifs : maniteneri ; maxineri) : 900 locuteurs selon UNESCO et 3 000 selon AA
Chontaquiro (dialecte du piro?) : aucun chiffre disponible
Apurina-ipurina-cangitil : 2 000 selon UNESCO et AA
Iñapari : 600 locuteurs selon UNESCO et 362 selon AA
Mashko-Piro (dialecte de l’Iñapari?) : aucun chiffre disponible
Branche Campa
Ashaninca : 65 000 locuteurs selon UNESCO et 15 000 à 18 000 selon AA
Asheninca : 18 000 à 25 000 locuteurs selon AA
Caquinte : 250 locuteurs selon UNESCO 200 et à 300 selon AA
Machiguenga : 11 000 locuteurs selon UNESCO et 7 000 à 12 000 selon AA
Nomatsiguenga : 4 500 locuteurs selon UNESCO et 2 500 à 4 000 selon AA
Pajonal Campa : 8000 locuteurs selon AA
Amuesha (isolat)
Amuesha : 8 000 locuteurs selon UNESCO et 6 000 à 8 000 selon AA
Sous-famille arawak du nord
Branche Rio Branco
Mawayana (nom alternatif: mapidian; mawakwa): 10 locuteurs selon UNESCO et presque éteint selon AA
Wapishana : 11 000 locuteurs selon UNESCO et 10 500 selon AA
Branche Palikur
Palikur : 1 800 locuteurs selon UNESCO et 1 200 selon AA
Branche Caribéenne
Garifuna (noms alternatifs: black carib; cariff): 116 000 selon UNESCO et 100 000 selon AA
Groupe Ta-Arawak
Añun-Parauhano : éteint selon UNESCO et presque éteint selon AA
Guajiro (nom alternatif: wayyuu) : 300 000 locuteurs selon UNESCO et AA
Arawak (nom alternatif: lokono) : 2 350 locuteurs selon UNESCO et 2 500 selon AA
Branche amazonienne du nord
Groupe Colombien
Achagua : 283 locuteurs selon UNESCO et 200 selon AA
Cabiyari: 50 locuteurs selon AA
Piapoco : 3000 locuteurs selon AA
Yucuna (nom alternatif: chuchuna ; matapi) : 600 à 700 locuteurs selon UNESCO et AA
Groupe Haut Rio negro
Baniwa d’Içana (nom alternatif: kurripako): 16 000 locuteurs selon UNESCO et 3 000 à 4 000 selon AA
Guarequena: 500 locuteurs selon UNESCO et 300 selon AA
Tariana : 110 locuteurs selon UNESCO et 100? selon AA
Groupe Orénoque
Baniwa de Guainia (nom alternatif: Baniva) : 500 locuteurs selon UNESCO et 200 (dont le dialècte warekana de xié) selon AA
Bare : 2 locuteurs selon UNESCO et presque éteint selon AA
Mandawaka: presque éteint selon AA
Groupe Moyen Rio Negro
Kaifana : éteint selon UNESCO et AA
Commentaires sur la classification les langues arawak :
Nous suivons ici la classification de Alexandra Y.Aikhenvald (1999).
La classification interne des langues arawak est un objet de débat constant parmi les linguistes, et il n’y a pas de classification stable pour le moment, beaucoup de ces langues sont peu documentées et les données disponibles insuffisantes pour qu’il y ait un réel consensus.
Comme souvent avec les langues amérindiennes, un nom peut désigner ce qui est en fait plusieurs langues, et l’inverse est vrai aussi, une même langue peut être connue sous un ensemble de noms. De plus, en fonction des critères de distinction langues/dialectes, leur nombre peut varier de 40 à 154 selon les sources.
Les langues arawak sont-elles en danger ?
Oui, toutes les langues arawak sont en danger, à plus ou moins court terme.
Une trentaine de langues aurait disparu au cours du 20ème siècle ou plus récemment, par exemple le kaifana et le mandawaka.
Il est possible que d’autres langues comme l’añun-paraujano ou le chamicuro soient également éteintes.
D’autres langues telles que le bare, le tariana, le cabiyari, le mawayana, le yawalapiti et le bauré sont menacées d’extinctions à très court terme, si elles ne sont pas déjà éteintes.
Toutes les autres langues sont considérées en danger ou menacées par l’UNESCO.
La langue dont la vitalité est la plus forte est peut être le garifuna mais son avenir n’est pas assuré pour autant à moyen terme.
Eléments ethnographiques
Les locuteurs des différentes langues arawak ne constituent pas un groupe culturellement homogène. Avant la colonisation, on pouvait tout de même distinguer grossièrement les populations qui vivaient dans les îles des Caraïbes (parmi lesquelles les Tainos, dont la langue est aujourd’hui éteinte) de celles qui vivaient dans les régions forestières d’Amérique du Sud.
Les Tainos
Les Tainos étaient locuteurs d’une langue arawak, et vivaient dans les îles des Grandes Antilles (Cuba, Hispaniola, Porto-Rico…) et une partie des Petites Antilles.
C’étaient des agriculteurs et des pêcheurs. Les communautés étaient généralement organisées en classes sociales, et les plus grandes îles, comme Hispaniola (les actuelles Haïti et République Dominicaine) étaient divisées en différents royaumes gouvernés par des caciques qui pouvaient être hommes ou femmes. Ils étaient en conflit constant avec les Caribes et pratiquaient une religion polythéiste centrée sur les « Cemis », des divinités incarnant des forces naturelles.
Les Tainos d’Hispaniola sont les premiers Amérindiens rencontrées par C. Colomb, lors de son premier voyage. L’arrivée des colons espagnols a signé la mort des Tainos. L’esclavagisme, les guerres pour les ressources, et les maladies importées du continent européen ont décimé la population en un temps très court. Même si les chiffres sont un objet de débat, il est estimé qu’en 20 ans, au début du 16ème siècle, la population Taino d’Hispaniola a été réduite de 90% !
Les locuteurs de langues arawak d’Amazonie
Les locuteurs de langues arawak d’Amazonie suivent un mode de vie complètement différent des anciens Tainos. Généralement, ils sont constitués en communautés plus petites, et plus isolées.
Bien qu’ils ne soient pas nomades, leur mode de vie fait qu’ils sont très mobiles et les échanges ont toujours été nombreux entre les différentes populations de cette région.
Leur histoire est souvent marquée par de longues migrations et des processus de fusion/fission entre les groupes. L’exogamie (le fait de se marier dans une communauté différente) est pratiquée, y compris entre communautés qui sont locutrices de langues très différentes, ce qui fait que le plurilinguisme n’est pas rare.
L’organisation sociale est très variable. Certaines communautés ont un ou plusieurs « chefs » et les anciens sont souvent des figures centrales quand il s’agit de prendre des décisions politiques.
Les villages sont traditionnellement placés sur les rives des fleuves qui servent de voie de transports, d’échanges commerciaux et de communication. Ils sont souvent composés d’une ou plusieurs « maisons communes » qui abritent plusieurs familles, faites d’une structure en bois, surmonté d’un toit de palme tressée.
Les membres de ces communautés sont des chasseurs-pêcheurs (pour les hommes) et agriculteurs (généralement pour les femmes). Ils pratiquent la culture sur brûlis, et l’agriculture est souvent basée sur les tubercules comme le manioc, l’igname et la patate douce.
Les populations les plus isolées et les plus éloignées des côtes et des villes ont été relativement épargnées par la colonisation pendant longtemps. Mais depuis le 20ème siècle l’exploitation de la forêt, des sols (particulièrement la recherche de l’or), la pollution des fleuves, le développement des villes, les missionnaires et les évangélistes ont bouleversé le mode de vie traditionnel des populations autochtones d’Amazonie et toutes ces cultures sont menacées de disparition de nos jours.
Les locuteurs de garifuna
Les Garinagu, locuteurs de garifuna, constituent un modèle culturel à part.
Ils sont issus de la rencontre entre les Amérindiens des caraïbes, Tainos et Caribes, et des esclaves africains amenés dans les exploitations agricoles des îles. La version officielle veut que cette rencontre ait eu lieu après le naufrage d’un navire négrier à St-Vincent au début du 17ème siècle. Les esclaves survivants se sont enfuis et mélangés à la population amérindienne. Chassés de leur île par les Anglais, ils vivent maintenant le long de la côte caraïbe au Nicaragua, au Honduras et au Bélize.
Le garifuna, bien que reconnu comme une langue arawak, est marqué par cette histoire et conserve la trace de diverses influences : langues caribes, anglais et créole anglais du Bélize. La plupart des locuteurs sont bilingues ou trilingues.
Site officiel du Conseil Garifuna du Bélize :
http://ngcbelize.org/content/view/3/1/
Sources
Aikhenvald, A.Y. (1999) « Arawak« . In R.M.W. Dixon and Alexandra Y.Aikhenvald, (eds) The Amazonian languages, Cambridge University Press.
Si vous avez des informations complémentaires sur cette langue n'hésitez pas à nous contacter : contact@sorosoro.org
Fiches descriptives disponibles pour les langues suivantes au sein de cette famille :